Coucou,
Voici la livraison quotidienne... J'espère que je ne me trompe pas trop dans les termes et les concepts scientifiques, je ne suis pas trop habituée à les manier. N'hésitez pas à me signaler des erreurs.
Jovienne
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Curtis ne se laissait pas le temps de respirer. Il voulait comprendre. Ils reçurent rapidement confirmation que les services de Neptune avaient réceptionné leurs données.
- Bien. Laissons les militaires travailler. Il est temps pour nous d'aller jeter un oeil sur tes découvertes, Otho. Cap sur ce secteur mais vigilance constante, ne nous faisons pas remarquer.
C'est ainsi qu'ils revinrent dans la zone qu'ils avaient repérée, et que, entouré de son halo anti-radar, le Comet fit le tour d'un astéroïde de taille moyenne sans remarquer à priori aucune trace d'activité humaine. Pourtant, les sondes du vaisseau continuaient à signaler des émanations anormales de rayonnement d'énergie, celles qui avaient attiré l'attention d'Otho quelques heures plus tôt. Afin d'en avoir le coeur net, Future choisit de se poser sur une zone déserte, au fond d'une dépression causée certainement quelques milliers d'années auparavant par une collision céleste.
- Il faut que quelqu'un reste à bord. Pour une fois, Grag, tu vas venir avec nous, tu n'as pas besoin de combinaison pour respirer, c'est un avantage. Joan...
- Toi, tu veux encore me mettre à l'abri !
- Écoute, j'ai vraiment besoin de quelqu'un qui sache éventuellement faire décoller le vaisseau en urgence. Aujourd'hui, ce sera toi.
Il avait pris, sans y penser, son ton naturel de commandement. En mission, peu de gens se hasardaient à essayer de le contredire. Joan savait d'expérience quand elle pouvait argumenter et quand c'était peine perdue. Son sens de la hiérarchie, qui n'était pas toujours parfait, loin s'en faut, lui donnait quand même certains réflexes, également. Elle s'inclina donc et se borna à dire :
- Soyez prudents, on ne sait pas ce que vous allez trouver, ce peut être dangereux pour vous.
Le ton était juste à peine appuyé. Curtis perçut parfaitement l'idée sous-jacente et d'un sourire, montra qu'il avait capté l'allusion.
- Simon restera avec toi, vous pourrez décortiquer et intégrer en direct dans l'ordinateur du Comet les enregistrements des capteurs de nos combinaisons.
- N'oubliez pas les détecteurs de radioactivité, surtout. Mieux vaut être prudent lorsqu'il est question de plutonium.
C'était le professeur Simon qui, avec pragmatisme, donnait ses derniers conseils tandis qu'ils se changeaient soigneusement. Même si les équipements avaient fait de gros progrès depuis le XXIe siècle, l'homme qui voulait affronter un milieu aussi peu propice que celui d'un astéroïde sans atmosphère, donc sans pression extérieure, à la gravité très faible, devait forcément avoir une protection adaptée. Ils arboraient tous à la ceinture un régulateur de gravité, et un casque générateur d'oxygène ceignait légèrement leur tête. Au poignet, un écran surveillait le niveau de radiation car même si leurs combinaisons comportaient un filtre, celui-ci ne pouvait être efficace que pendant un certain temps d'exposition.
Joan les regarda sortir du vaisseau et s'éloigner dans un petit véhicule à propulsion ionique. Le Comet avait été posé sur le côté d'un petit cratère austère et nu, aussi brillant et lisse qu'une patinoire terrienne. Au loin, les bords déchirés formaient, en un arrondi presque parfait, des pics de glace irréguliers, montagnes d'où émergeaient ça et là des morceaux de roches à nus. D'immenses blocs de glace aux silhouettes fantasmagoriques, hautes comme plusieurs immeubles parfois, emplissaient l'espace autour d'eux, à la lisière du cratère. Ils masquaient du mieux possible l'astronef posé qui voulait rester invisible. A l'intérieur, Joan et le professeur Simon s'étaient installés devant les écrans de contrôle, pour suivre à distance le parcours de leurs amis.
Ceux-ci avançaient avec prudence vers l'extérieur de ce creux particulier. Grag pilotait, concentré, attentif à éviter les monceaux de glace et à trouver le meilleur parcours possible au milieu de ce labyrinthe. Pendant plusieurs heures, ils se frayèrent ainsi un chemin en direction d'un point précis qui, sous le regard scrutateur des sondes du Comet, avait révélé ce rayonnement qui ne pouvait s'expliquer, selon eux, que par une activité humaine. Curtis se décida :
- Nous approchons. Il faut cacher le véhicule et continuer à pied. Grag, tu nous attends. On se met en liaison radio.
Ezra, Otho et Curtis commencèrent l'ascension du dernier obstacle qui les séparait encore de leur but. Arrivés au sommet, ils passèrent prudemment la tête, pour constater que leur intuition ne leur avait pas fait défaut. Sous leurs yeux, des installations récentes et rustiques mais incontestablement d'origine humaine se dressaient, invisibles depuis l'espace car dissimulées sous un immense dôme glacé qui formait comme un avant toit à une caverne qui semblait se prolonger profondément sous une couche de roches et de glaces. Dans cet espace façonné par des millions d'années d'errance dans le vide sidéral, un astroport sommaire avait été aménagé. Un vaisseau-cargo, les soutes ouvertes, était en train d'être empli par quelques hommes qui manipulaient des appareils monte-charge en un incessant va-et-vient. Mais le plus surprenant était que deux hommes en armes surveillaient les opérations.
- Et bien, Capitaine, tu as eu raison d'insister. Que se passe-t-il ici ? Et regardez, on dirait qu'ils sont nombreux là bas dessous. Mais comment savoir l'importance souterraine de tout ça ?
Ezra, comme ses compagnons, était intrigué. A ce moment-là, la voix de Joan résonna dans leurs oreilles.
- Capitaine, regardez vos compteurs Geiger, les chiffres qui arrivent sur l'ordinateur montrent une légère augmentation de la radioactivité autour de vous.
- C'est certainement dû à ce que nous avons sous les yeux. Je mettrais ma main à couper que ces petits containers plombés en train d'être chargés contiennent du plutonium enrichi. Nos compteurs sont sensibles, ils notent la présence du combustible.
- Que fait-on, chef ? demanda alors Otho, qui essayait d'analyser les mouvements qui se déroulaient loin devant eux. Il me semble difficile d'estimer leur nombre, leur niveau d'armement.
- Tu as raison. Je crois que pour le moment, il nous faut rebrousser chemin. Nous en avons appris assez. Nous pisterons le vaisseau quand il décollera. Pensez-vous comme moi qu'il nous ramènera vers Haumea ?
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(A suivre)
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...tout ce qu'on rêve est fiction et tout ce qu'on accomplit est science, toute l'histoire de l'humanité n'est rien d'autre que de la science-fiction. Ray Bradbury.